(ce pseudonyme est une translittération fantaisiste du mot russe qui signifie « crayon »), est né à Moscou le 6 novembre 1858. Il est le descendant d’un grognard de l’Empire, qui, par amour, était demeuré en Pologne avant de se fixer définitivement en Russie.
Caran d’Ache restera fidèle toute sa vie à l’image héroïque qu’il s’est faite de son ancêtre et de l’épopée de celui-ci dans les armées de Napoléon. Dès son arrivée en France en 1877, il contracte un engagement de cinq ans dans l’armée. Lorsqu’il collabore à La Caricature , c’est encore avec des scènes martiales ; et quand il inaugure le théâtre d’ombres du Chat-Noir, il évoque les campagnes de la Grande Armée. On décèle chez lui une fascination devant les grands rassemblements, un attrait pour l’ordre. Il devint rapidement une personnalité en vue du « Tout Paris ». Son accent russe, son côté dandy ajoutaient du pittoresque à son talent.
Il y a un lien évident entre le goût de Caran d’Ache pour le déploiement militaire et son attitude de caricaturiste au cours de l’affaire Dreyfus.. Dans la caricature antidreyfusarde, en revanche, il manifeste une haine profonde, collective , au nom du nombre mutilé . Pour lui qui croit à la culpabilité de Dreyfus, ce dernier est « tombé » volontairement ; il rompt l’unité de l’armée, l’unité que forme le nombre ; il trompe l’attente du désordre héroïque ; il entre forcément dans cette autre unité qui est l’ennemi, il en est la forme insidieuse : le juif. Il fut l’un des caricaturistes politiques les plus féroces de cette affaire.
Le cas de Caran d’Ache est exemplaire. Il reflète l’attitude d’une bonne partie des Français, déchirés par la guerre de 1870-1871, la Commune et un implacable processus d’industrialisation. Ces Français tentent de reconstituer une unité à travers l’image d’une armée héroïque, tendue vers la revanche. Son décès survint à Paris le 29 février 1909.
Célèbre dessinateur de presse, collaborateur du Rire, du Chat Noir, de La Vie Parisienne, de La Caricature et du Figaro. Il dirigea avec Forain l’hebdomadaire Psst. Caran d’Ache fut aussi un pionnier de la bande dessinée sans paroles. Son style graphique a fait école.
Note de l’Éditeur : La réédition du fameux Carnet de chèques ne saurait en aucun cas cautionner des sentiments qui permirent d’opposer les races pour finalement ensanglanter les continents.
Pour mieux comprendre : Jean Pierre Bloch, un français du monde entier par René VÉRARD.