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Profitant de la traditionnelle animation de la Saint Roch à Saint Satur, sur la Loire (au pied de Sancerre) pour revenir sur l’une des plus anciennes activités nautiques : les joutes. Il a été retrouvé des représentations de joutes nautiques sur des bas-reliefs datant de l'ancien empire égyptien de la IIIe à la VIe dynastie, soit il y a environ 4 600 ans.

En cette lointaine époque, c’était davantage des combats sur l’eau plutôt qu’un plaisant loisir réglementé parce que l'affrontement se déroulait alors sans aucune protection tandis que les gaffes étaient munies de ferrures à deux pointes acérées à leurs extrémités. Malheur au perdant ...

Après cette première version égyptien, on retrouve les joutes nautiques dans la Grèce antique. Puis les grecs importent ce sport en Sicile. Les romains qui adorent les spectacles de combat en sont très friands. On peut ainsi trouver d’innombrables évocations de joutes durant l’Empire romain. Les maîtres du monde d’alors organisaient de véritables spectacles nautiques dans des arènes conçues pour recevoir un immense bassin en leur centre. Du pain et des jeux, le secret éternel pour assoir sa domination sur un vaste territoire.

C’est sans doute sous l’influence romaine que les joutes se sont répandues dans tout leur empire. Nous trouvons ainsi traces de joutes nautiques en 303 à Strasbourg et d’autres à Massalia. Puis, le déclin de l’Empire ne permet plus de suivre les traces de l’activité qui a peut-être résisté de ci de là dans certaines communautés de nautes ; les marins de rivières.

C’est à Lyon en 1177 que l’on évoque dans une archive un tournoi de joutes. Il se déroule le 2 juin, dans des eaux sans doute accueillantes à cette époque de l’année. On célèbre par cette activité le millénaire des martyres chrétiens dans la région. Un autre document raconte qu’avant de partir aux croisades sous le règne de Louis IX, soldats et marins passent le temps dans des combats nautiques sur des embarcations légères. Ceci se passe à Aigues-Mortes.

Plus tard, on a la surprise de trouver mention de joutes en Sologne au XV siècle mais c’est le plus souvent vers la Méditerranéenne et la Région du Rhône que la passion des joutes est la plus présente. Sur le Rhône justement, des sociétés se créent, issues certainement des confréries de nautes (qui régulent la navigation commerciale), afin de pratiquer ce loisir.

En cette époque, à Saint Rambert sur la Loire, en 1536, un tournoi de joutes est donné pour célébrer la visite de François Premier. C’est donc que les mariniers de Loire connaissaient eux aussi ce sport et s’y adonnaient durant les périodes de chômage ; niveau d’eau trop bas pour la navigation commerciale.

Le XIX siècle voit l’explosion des activités sportives. Les joutes ont une place à part dans la mesure où elles sont souvent associées aux activités de secours aux riverains lors de crues. C’était encore une manière de garder contact avec la rivière alors que la marine fluviale mourrait progressivement depuis l’intrusion du chemin de fer dans le paysage commercial.

C’est ainsi qu’en 1899, alors que la navigation fluviale commerciale a disparu presque totalement qu’est fondée l’Union des Sociétés Françaises de natation et de sauvetage. Un championnat national de joute aura lieu en 1901.

Les choses évolueront progressivement jusqu’à la reconnaissance en 1960 des joutes comme discipline sportive en France. Des clubs de joute se créent en Loire à Saint Rambert, Roanne, Saint Satur, Orléans et plus bas encore. Elles ne parviennent cependant pas, pour diverses raisons, à être aussi actives que dans le Midi ou en région parisienne. Le club d’Orléans par exemple disparaît malgré tous les efforts de son président.

Le renouveau des joutes de la Saint Roch est peut-être le signal d’un nouvel élan. Il faut l’espérer tant le succès de cette fête est réjouissant. Pour en savoir plus sur les joutes, vous pouvez consulter l’ouvrage de Jean-Pierre Simon à Corsaire éditions sur les jeux de Loire.

Un extrait du livre :

.../...Les joutes requièrent une lance en sapin, terminée par un crampon de fer, dont la taille se mesure en pieds selon les catégories. Pour les lourds, c'est cinq mètres. Le jouteur est campé sur la plate-forme arrière du bateau : le tabagnon. Il se cale sur une butée : le taquet. Le  bourron, lui servant de cale pour sa main droite lui enserre la cuisse droite. Le plastron, son bouclier, est maintenu grâce à une sangle lui enserrant le cou et l'épaule gauche, tandis qu'une autre sangle beaucoup plus courte est passée dans sa main gauche. Il doit tenir sa lance des deux mains, sans la lâcher durant le déroulement de la passe. Il ne doit pas non plus toucher le tabagnon avec une autre partie du corps que ses deux pieds sous peine d'être aussitôt mouillé  pour avoir  briqué . Il est en outre obligé de toucher ou de piquer dans le carré central du plastron adverse, appelé  neuf .

Deux postures sont possibles : jambe cassée ou jambe tendue. dans la méthode lyonnaise, les bateaux se croisent par la gauche ; dans la variante givordine (de Givors), ils se croisent par la droite. .../...